En montant la grande ligne droite qui vous mène à l’entrée de Saint Haon Le Vieux, l’église Saint Abonde, dresse son solide clocher au centre du village où elle nous accueille fièrement. Elle domine majestueuse et silencieuse le paysage et sa présence imposante et discrète se rappelle aux habitants grâce aux tintements des cloches qui rythment les heures d’une journée.
L’église née en 1877 montre aujourd’hui quelques faiblesses et demande le secours de ses paroissiens, de ses villageois et de la municipalité. L’église est patrimoine de la commune depuis 1905 après la séparation de l’église et de l’Etat. Son rôle autant religieux que civil suscite aujourd’hui toute notre attention pour engager une restauration nécessaire qui lui assurera sa pérennité et sa mise en valeur en l’intégrant dans la vie touristique de la Côte Roannaise.
Saint Haon Le Vieux, autrefois Saint Haon l’Eglise était la paroisse de Saint Haon Le Châtel, jusqu’au XVe siècle. Citée dès 949 dans les chartes de Cluny, une paroisse unique existait avant le XIe siècle à La Barre sous le vocable de Saint Bonnet. Elle aurait été englobée par Saint Haon l’Eglise se séparant de Saint Haon la Ville devenue Saint Haon de Châtel.
Le terme « Vieux » viendrait du latin vicus signifiant le « village à la campagne » et non pas de vetus signifiant « ancien ». Il y avait donc « Saint Haon le Chasteau » et « Saint Haon le village ».
L’église fait partie de la paroisse Sainte-Madeleine en Côte Roannaise qui comprend 14 clochers.
La paroisse de Saint Haon Le Vieux est sous le patronage de Saint Abonde. Qui est ce saint ?
Saint Abonde :
ABUNDIUS, martyr à Rome se signala pendant la persécution de l’empereur Valérien, par son zèle envers les restes des martyrs auxquels il donnait une sépulture ; ce zèle lui procura le bonheur d’être associé à leur triomphe. Ayant retiré d’un cloaque, où il avait été jeté, le corps de Sainte Concorde, il y fut précipité à son tour, tout vivant avec Saint Irénée qui le secondait dans ses œuvres.(entre 253 et 260).
St Abonde est honoré dans la région de Lyon, ainsi que St Hand ou St And qui sont cités comme les mêmes saints que St Abonde
La statue de Saint Abonde est placée à l’extérieur de l’église, au-dessus du porche d’entrée. Actuellement, Saint Haon Le Vieux célèbre son saint le 26 août.
Histoire de l’église :
Avant 1610, une chapelle entourée d’un cimetière est construite sur la place actuelle.
En 1612, une grande cloche est fondue dont le parrain est le fils de Monsieur de la Chambre et la marraine la fille de Monsieur Langeron.
En 1786 sur la place centrale, se dressait une église à une seule nef, avec chœur plafonné et nef lambrissée, agrandie en 1826 mais dont la partie la plus ancienne remontait au XIVe siècle
En 1787, Marie Blanche de Nompère y est enterrée.
En 1805, le conseil de fabrique qui gère les biens de l’église de la paroisse pense que le cimetière est mal placé et l’église vétuste ne répond plus aux besoins de la population composée de 900 habitants. Le conseil municipal, lui, envisage seulement des réparations qu’il entreprend de 1830 à 1850 : Chœur, clocher, toiture, mur du cimetière.
En 1853, le curé Seguin propose la reconstruction et son plan de financement. Le conseil municipal refuse.
En 1855, le curé s’engage à trouver des fonds nécessaires pour la construction d’une nouvelle église. Le conseil municipal accepte. Le curé organise des souscriptions auprès des paroissiens qui émettent leurs souhaits : une église deux fois plus grande et un autre emplacement au sein du village.
Après vingt ans d’hésitation, alors que l’ancienne église menaçait de tomber en ruine, la construction de la nouvelle église peut débuter.
La décision fut donc prise de confier sa réalisation à l’architecte roannais Etienne Paszkowicz.
En juillet 1876, Etienne Paszkowicz est à Saint Haon Le Vieux en présence du maire, monsieur Stéphane Bertaud, de son adjoint Charles Palais et du prêtre de la commune, le curé Seguin pour poser et assister à la pose de la première pierre de la nouvelle église.
En 1880, le vieux cimetière et la vieille église sont démolis. Seules, la croix sur la place de l’ancien cimetière et la croix Monloup témoignent de cette époque.
Notre église fait sans doute partie de l’époque des curés bâtisseurs (1840 à 1890). Ces prêtres exemptés du service militaire participaient à la construction des églises. La France, à cette époque connait un mouvement inouï et intense d’édification d’églises, construites dans le style néo-gothique très en vogue au XIXe siècle. (Cathédrale Notre dame de Paris, Basilique de Vézelay réalisées par Eugène Viollet-le-Duc architecte français connu pour ses restaurations d’édifices religieux et châteaux.)
ETIENNE PASZKOWICZ :
Etienne Paszkowicz a laissé de très belles réalisations dans notre région pour que nous nous arrêtions sur le personnage.
Emigré polonais né à Varsovie en 1846. Condamné à mort par l’empire russe lors de l’insurrection polonaise, il trouve refuge en France auprès de son oncle, le docteur Michalowski, bien connu dans l’immigration polonaise. Arrivé à Paris en 1866, il suit des cours de L’Ecole Spéciale d’Architecture. De nouveau, il repart au combat dès la guerre de 1870, est capturé par les allemands et fait prisonnier à Cologne. Il s’établit enfin à Roanne comme architecte. Nommé architecte des monuments historiques du département de la Loire, il obtient en 1920 une médaille d’or et le prix d’honneur de l’Association provinciale des architectes français. Il se marie avec Jeanne Marie Vadon et ont 3trois enfants.
Certaines de ses belles réalisations sont connues, comme la chapelle de l’institution Saint Joseph aujourd’hui le Lycée Saint Paul et les deux magnifiques demeures Place du Marché à Roanne : la Maison Déchelette style Renaissance et l’immeuble style Louis XVI à l’angle de la rue du coq. Sans compter la construction de 22 églises dont celle de Renaison.
Ce constructeur aime laisser des traces comme inscrire très discrètement dans la pierre les symboles pérennes que son âme de déraciné lui inspire : un coq, emblème de la France, sa terre d’accueil, à l’angle de la rue du coq à Roanne et un aigle blanc, emblème de sa terre natale sur une colonne à la sortie de l’église de Saint Haon Le Vieux. Ou encore, gravé dans la pierre au fond de l’église le prénom de sa fille Marthe (A vous de la découvrir !).
Il meurt en 1923 et est enterré au cimetière de Roanne.
L’église d’aujourd’hui :
L’église actuelle est de style gothique primitif, construite en granit avec un clocher-porche. L’intérieur est composé de la nef centrale flanquée de deux nefs latérales surbaissées, et d’une abside à 5 pans ; l’ensemble est voûté sur croisées d’ogives
Cette église aux proportions agréables, au décor soigné et complet et aux vitraux non signés comporte des portraits de belle qualité. La conservation complète de son décor, lui assure une grande unité : rien n’a été modifié ni enlevé depuis sa conception. Cette authenticité mérite l’intérêt que nous lui accordons.
On peut aussi admirer les 20 vitraux qui tous, représentent des saints, dont Saint Vincent, patron des vignerons et Saint Claude (XIXe). Dans le chœur de l’église on peut voir les armoiries de la famille Nompère de Champagny et celles de la Famille de Valence de Minardière (vitrail Saint André).
Pour sa construction, le cahier des charges a été précis. Il stipule que les pierres de taille viendront de Volvic ou en granit, que le sable viendra de la Loire, que les briques seront achetées aux tuileries de Fontval à Roanne, que les ferrures seront en fer et payées toutes posées au kilogramme. Le 30 mai 1877, le conseil municipal annonce que le clocher est construit. Celui-ci ne convient pas aux habitants. En conséquence, il est démoli et remplacé par un clocher s’élevant à onze mètres, ayant la forme d’une pyramide octogonale avec un escalier en escargot et en pierre.
Nous voyons aujourd’hui, ce clocher à flèche pointée vers le ciel. Grâce à lui, nous repérons au loin St Haon le Vieux dans le paysage. Il nous sert d’amer lorsque lors d’une balade ou d’une randonnée nous cherchons à nous situer et nous déplacer. Il personnalise et localise le village
Le clocher et les cloches :
Le clocher de l’église Saint Abonde abrite 3 cloches qui ont été bénies en 1947.
Venues directement de la fonderie de Paccard d’Annecy- le -Vieux, elles ont été baptisées le 30 novembre 1947. Chaque cloche à son prénom :
Marie-Henriette pour le LA et pèse 460 Kg
Marie-Germaine pour le SI et pèse 325 Kg
Marie-Madeleine pour le DO et pèse 225 kg
Les cloches ont un rôle important et sont intrinsèquement liées à la vie des villageois. Les cloches rythment autant la vie quotidienne en ponctuant les heures de la journée que la vie religieuse en annonçant les évènements religieux individuels ou collectifs.
Chaque tintement de cloches à sa propre ritournelle qui annonce l’évènement : Cloches sonnant à la volée pour les mariages, baptêmes, messes. L’angélus qui marque le temps liturgique, le glas pour les décès, le tocsin qui alerte sur les dangers imminents : incendie, catastrophes naturelles, grêle, récolte.
En 1950, le tocsin a sonné pour la dernière fois à l’église Saint Abonde.
Le 25 mars 2020, (jour de l’Annonciation pour les catholiques), à 19h 30, les évêques de France ont pris la décision de faire sonner les cloches de toutes les églises de France pendant 10 minutes pour annoncer le début du confinement de l’épidémie du coronavirus.
Les cloches contribuent encore aujourd’hui à jouer un rôle principal dans les évènements de recueillement et d’unité d’une population d’un village, mais aussi de ponctuer et faire vibrer de leur sonorité un pays entier.